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TOUJOURS L’AMOUR

dimanche 22 décembre 2013, par Robert Vigneau

NAIGRERIES a été publié à compte d’auteur à Dharwar (Inde) où nous vivions. Dans cette ville reculée du Karnataka, l’imprimeur ne possédait qu’une imprécise casse anglaise de lettres en plomb… Anglaise donc sans les accents et autres signes qui font la singularité du fançais. D’où l’idée, par exemple, de composer certaines pages du recueil en majuscules.

Cela convenait à un recueil qui se voulait grinçant, révolté par les orthographes - entre autres contraintes de sociétés ouvertement ou subtilement ségrégationnistes. Nous découvrions l’Asie brune aux perspectives sociales et culturelles qui échappaient aux critères occidentaux, alors jugés universels…

Dans les années 70, le monde basculait-il ? Difficile maintenant d’imaginer ce temps crispé d’avant la mondialisation informatique ! Ces poèmes où je me prétends Africain exilé de sa brousse pour faire poinçonneur du métro, exprimaient-ils ma rage d’alors ? Cette envie de tout casser !

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pour Marie-Hélène
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Je voudrais être blanc,
 
je voudrais être nègre
 
pour rêver en couleur
 
des envols goélands,
 
oh ! je voudrais renaitre
 
au bout de l’an, de l’heure
 
pour vivre an noir et blanc.
 
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Pour vivre, vivre, vivre,
 
Justine ouvre tes bras
 
l’un de craie l’autre d’ombre
 
ci-fournaise ci-givre
 
et tes etcétéra
 
où se blottir très contre.
 
Je m’encannnibalivre…
 
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Oh ! je voudrais danser,
 
oui : danser immobile
 
et mordre la musique
 
aux douceurs cannibales,
 
caresser les couleurs :
 
je voudrais dormir nègre
 
et je voudrais mourir.

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NAIGRERIES, Dharwar, (Ravindra Press, 1973), Toujours l’amour, p. 65- 67

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Ci-clos le recueil Naigreries…  

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